Une autre découverte du Canada
Après 5 voyages dans les états de l’Est Canada, nous tentons une autre approche de ce pays : la découverte des Montagnes Rocheuses de l’Alberta à l’Alaska en passant par la Colombie Britannique et le Yukon.
Comme par le passé nous avons loué par l’intermédiaire de Camping-Car-On Line un véhicule à Calgary en Alberta (Vol direct de Paris) mais cette fois on nous a attribué une cellule sur pick-up 4X4 au lieu du « van » que nous avions l’habitude de réserver. La raison : l’état des routes de l’Alaska, ce qui après coup, de notre point de vue n’était pas forcément nécessaire. Cependant sur place nous avons constaté que plus de 60% des « VR » (Véhicules Récréatifs) rencontrés (location ou particuliers) étaient ce modèle de camping-car !
Autre différence : un nouveau loueur : » Fraserway » une grosse société locale disposant d’un parc impressionnant (plus de 300 véhicules entrant ou sortant le jour de notre départ !) Une convivialité assurée : hôtesse parlant français et un minimum de problèmes techniques à régler et pas de caution de garantie prélevée !
Les formalités sont rapidement réglées et nous prenons possession de ce gros véhicule : une cellule sur 4X4 Dodge Ram, impressionnant, mais la prise en main est facile d’autant plus que l’on a déjà conduit ce type de véhicule au Canada ! (un moteur de 5,7 l. de cylindré, 350 cv, diesel, de plus de 6 tonnes et une hauteur de 3,65 m.)
Avant de prendre la route nous effectuons l’approvisionnement habituel et nécessaire (courses au supermarché de Airdrié) puis nous empruntons la Transcanadienne au nord de Calgary : direction les Rocheuses. C’est la longue chaine de montagne à l’ouest du Canada qui longe la côte du Pacifique du sud des Etats Unis à l’Alaska.
Notre objectif était de découvrir les grands espaces sauvages qui caractérisent cette région et nous n’avons pas été déçus ! En effet : l’Alaska-Highway (ALCAN) que nous emprunterons au retour parcourt pas moins de 4500 km entre Dawson -Creeck en Colombie Britannique (BC) et Fairbanks en Alaska. Initialement une route militaire construite en 1942 pour désenclaver le nord des USA menacé par les japonais elle est devenue la seule route permettant de rejoindre Anchorache et les débouchés des secteurs pétroliers de cet état lointain. Elle est aussi maintenant une route très empruntée par les touristes qui vont passer quelques mois très loin du sud des USA ! Elle ne traverse que quelques agglomérations, des petits bourgs ou hameaux où l’on peut et doit se ravitailler à chaque fois qu’il est possible. Les trajets de liaison sont longs 300, 400 km et faire le plein est impératif !
Ces remarques générales sont d’autant plus importantes que nous avions décidé de « monter » vers le nord : vers Whitehorse au Yukon en empruntant une autre route, une voie beaucoup moins fréquentée entre la chaine principale à l’est et la chaine côtière à l’ouest. En Alberta elle nous fait traverser les grands Parc Canadiens de Banff et de Jasper. Cette région très touristique nous fait découvrir une chaine de montagne avec plus de 40 sommets dépassants 3000 m. d’altitude avec un nom significatif : la « Icefields Parkway ».C’est une région particulièrement bien aménagée.
Cette route permet de découvrir des espaces sauvages et des paysages grandioses » à couper le souffle ». C’est une succession de montagnes de forêts de glaciers et où l’ours noir est régulièrement croisé !
Puis nous entrons en B.C. longeant la Fraser River par une route catalogué « difficile ».Ce n’est pas une route « alpestre » comme nous les connaissons pas de cols de hautes altitudes, on circule entre 700 et 1200m sur une chaussée plus ou moins large, pas toujours très bonne avec encore quelques portions empierrées. Pour les « locaux » habitués aux autoroutes américaines elle est effectivement plus délicate à certains endroits mais encore très loin de nos routes de montagnes. Dans ces régions on a souvent l’impression d’être seul sur la route. Si l’on croise quelquefois un autre touriste, des camions, on peut rouler des dizaines de km sans avoir personne ni devant ni derrière soit ce qui donne une impression un peu angoissante de vide ! Mais lorsqu’on s’arrête on constate qu’il y a quand même une circulation mais très fluide et de plus très courtoise mais attention aux gros « trucks »de transport de bois …
On me demande souvent : mais pourquoi voyager dans de telles régions ?
C’est vrai pourquoi traverser, rouler des heures durant dans un paysage de forêt, de lacs, de montagne, vide de toute concentration humaine où, par exemple, pour rejoindre deux villes : Prince George en Colombie Britannique (BC) à Whitehorse (au Yukon) par la » Cassiar-Highway », il faut parcourir 1800 Km en ne traversant que de petites agglomérations de quelques centaines d’habitants, eux même plus ou moins dispersé dans la forêt. On traverse quelques bourgades, station touristique au bord d’un lac, carrefour plus important, qui permettent de se ravitailler au minimum.
Parce que ce sont des régions où l’on retrouve la nature à l’état brut « sauvage » et cela sur des centaines de km, sans habitant ou très peu cela veut dire sans pollution, sans perturbation apporté par l’homme. La seule « industrie » dans cette région canadienne demeure l’exploitation forestière que les autorités se doivent de maîtriser….
Dans le nord de la Colombie nous traversons sur des dizaines de km de grands espaces de forêt brulé : une désolation visuelle mais pas forcément inutile : la nature se reconstruit après. Nous atteignons la » vraie » grande route du pays, l »’Alaska Highway », l’impression de solitude reste la même, bien que la circulation soit relativement plus importante.
Nous sommes maintenant au Yukon, l’état canadien le plus au nord du continent américain. Il s’étend sur une surface égale au ¾ de la France pour une population de ….35 000 habitants ! Surprise pour nous cet état est bilingue, francophone et francophile : souvenir du passage des milliers d’aventuriers qui partirent de là pour faire fortune lors de la ruée vers l’or du Klondike à la fin du XIX siècle !
Le paysage a peu changé et nous longeons une chaîne de montagne aux sommets enneigés qui dépassent les 4 ou 5000 m. d’altitude et ce sur les 1 000 km qui nous séparent encore de la frontière des USA ! Les Rocheuses sont vraiment une chaîne de montagne imposante qui, pour nous européens, nous impressionne par sa continuité et la présence d’immenses glaciers. Sur cette portion de trajet la seule ville rencontrée est Whitehorse, la capitale, 20 000 habitants, la quasi-totalité de la population de l’Etat ! Une grosse activité mais la seule attraction touristique est l’ancien bateau à aube souvenir de l’activité fluvial qui existait à l’époque de la conquête de l’or…
Au Yukon nous longeons, au pied de la montagne, les territoires de l’immense Park Kluane dominé par le mont Logan (5 959m.) Le long du lac du même nom (une véritable mer intérieure !) nous avons la chance de rencontrer plusieurs fois des grizzlis sur la route !
Après Beavercreeck, c’est l’entrée aux USA en l’Alaska, le 49 ème état. Heureuse surprise : au poste frontière pas de formalités complexes avec le passeport « biométrique « : on compare nos empreintes à celles du document et en 15 minutes nous obtenons notre visa (moyennant 6 $ par personne) mais à partir de là il faut songer à modifier le compteur de vitesse de km en miles et actualiser une nouvelle fois nos montres ! (depuis notre arrivée en Atlanta l’heure recule d’une heure par état !)
Les paysages ne se différencient guère de ceux du Yukon. Le Yukon et l’Alaska forme le même espace naturel et touristique : le parc Wrangel et St-Elias jouxte le parc Kluane. L’aspect général de la route non plus !.A partir de Tok, un grand carrefour nous quittons l’Alaska- Highway qui monte plus au nord, pour nous diriger vers les points accessibles de la côte du Pacifique Nord et atteindre en premier lieu le petit port de pêche de Valdez. Sur » la Richardson Hw » nous bivouaquons au pied de l’imposant glacier de Worthingtone dans un cadre froid et montagneux. Le lendemain après avoir roulé dans un cadre très enneigé nous rejoignons la côte non sans franchir le Keystone- Cayon, haute barrière rocheuses animée par de vertigineuses cascades.
Valdez petite ville de quelques milliers d’habitants est très fréquentée par les touristes amateur de pêche. Elle ne présente aucun intérêt particulier sauf celui d’être le terminal de l’énorme pipeline (1’20 m. de diamètre) qui amène le pétrole depuis la côte nord de l’état sur 1300 Km ! Et ce nom est resté tristement célèbre depuis qu’un navire pétrolier, l’Exxon- Valdez causa lors de son naufrage en 1989 une terrible catastrophe écologique dans toute la région .Elle a été détruite par un tsunami en 1964 comme d’autres villes de la côte et reconstruite plus à l’intérieur.
Nous retournons sur nos pas pour reprendre, à partir de Glenhallen, la » Glen Highway » qui nous mènera à la plus grande ville de l’Alaska Anchorage (Juneau la capitale se trouve dans le « passage sud »). Anchorage n’a rien gardé de son caractère « pionnier », ville US moderne sans intérêt Après l’avoir traversée nous prenons au sud une route côtière qui longe un profond fjord dominé par des parois neigeuses où l’on a pu apercevoir des chèvres de montagnes….. . Au fond nous atteignons la » Péninsule du Kénaï » un des objectifs de notre voyage.
Ce secteur est un haut lieu du tourisme en Alaska, Cette presqu’ile profondément découpée est coiffée de plusieurs immense glaciers dont les ramifications se prolonge jusqu’à l’océan et constitue le Kénaï National Park. Cette région très touristique attire les fervents de la pêche au saumon depuis le sud des Etats Unis. C’est une véritable institution ! Pour gagner le » Kénaï National Park » et son ensemble de glaciers, de rivières, et de fjords on parcourt 8/9 000km avec son » bus camping-car » depuis Miami ou San Francisco pour s’installer dans un camp en bord de mer ou près d’une rivière, mais il faut songer à réserver son emplacement !Malgré cette fréquentation cette immense péninsule reste très sauvage avec des paysages grandioses mêlant montagne mer et glacier. Nous nous arrêterons dans les deux « villes » bourgades de quelques milliers d’habitants mais déjà très animées en ce mois de juin. Homer où les camping-cars sont parqués par centaines le long de la lagune qui prolonge la ville, et Seward petit port dans un cadre féérique. Là nous sacrifierons à la traditionnelle promenade en mer où je le reconnais j’ai pu observer baleines, phoques, otaries et nombre d’oiseaux marins mais aussi découvrir un magnifique panorama d’une langue de glacier d’un front de plus d’un km se déversant dans l’océan semant çà et là quelques petits icebergs.
Mais cette région conserve un aspect très particulier puisse qu’ici on trouve les traces d’un passé historique de l’ancienne présence russe du XIXème siècle un nombre certain d’églises orthodoxes typiques, bien conservées.
Là encore sommes obligés de retourner sur nos pas, retraverser Anchorage, pour prendre vers le nord la « George Parks Highway ». Le paysage est toujours le même cadre de forêt et de lacs mais le relief de l’intérieur est plus varié, tantôt des vallonnements, tantôt de hautes montagnes lorsque l’on approche du célèbre parc du Dénali. Ce lieu est aussi célèbre aux USA que le Yellowstone et autant fréquenté par les touristes. Il est vrai que ce parc possède le plus haut sommet de l’Amérique Nord le Mt Mac Kinley (plus de 6000m) renommé Dénali par référence à la population autochtone. La renommée de ce parc tient à son aménagement, à ses offres d’hébergement et ses activités orientées vers l’observation de la faune sauvage nombreuse et protégée : ours, élan et loup en particulier mais aussi aux nombreuses possibilités de randonnée et d’escalade.
Nous laisserons ce lieu très médiatisé pour poursuivre notre route vers le nord et à travers des régions très sauvages nous atteindrons la ville du nord Fairbanks, ancien poste de traite de la fourrure et point de départ pour les chercheurs d’or. Sur la rivière Tanana vous avez encore le loisir d’effectuer une promenade en bateau mue par une roue à aube ! Mais la ville, cité universitaire de l’Alaska a perdu beaucoup de son intérêt et vit en partie maintenant grâce à la présence d’une importante base militaire US.
C’est le point le plus nord de notre voyage : il nous faut envisager le retour qui s’effectuera presque en totalité par l’ »Alcan » (la route de l’Alaska). Nous « redescendons » avec un paysage moins sauvage, plus peuplé, plus cultivé : la partie active de l’Alaska sur le plan agricole, du moins jusqu’à Tok où nous avions bifurqué à l’aller. Après nous retrouvons les impressions identiques de montagnes et de forêts et quittons momentanément l’Alaska pour retrouver un petit moment le Yukon de Beaver- Creeck à Haines- Junction pour retourner à nouveau en Alaska vers Haines. On ne peut atteindre cette région de l’état des USA que par cette route ou…. par la mer ! Nouveau passage de frontière et nous redescendons vers le Pacifique pour retrouver ce typique petit port dans toujours ce cadre merveilleux de mer et de montagne enneigées. C’est un lieu très touristique, très fréquenté par les pêcheurs, où accostent les grands paquebots de tourisme. Mais c’est aussi un cul de sac ! Pour en sortir il nous faut soit retourner sur nos pas, soit prendre un ferry qui nous emmène en quelques heures vers Skagway au fond d’un autre fjord d’où repart une route qui nous permet de rejoindre notre chemin de retour : solution que nous choisissons .Les circuits sont compliqués dans cette région !
Ils l’étaient aussi pour les chercheurs d’or qui à la fin du XIXème siècle débarquaient dans ce petit port de Sgaway qui cultive son passé historique de » conquête de l’Ouest » dans ses bâtiments aux façades de bois coloré. Il s’agissait alors de rejoindre le Klondike et la fortune promise ! Hélas pour ces aventuriers il leurs fallait sortir de ce fond de fjord et gravir la Chilcot- pass ou la White- pass, deux cols escarpés, pour accéder au cours du Yukon et rejoindre Whitehorse. A cause du relief, du climat rigoureux, beaucoup n’y parvinrent même pas et moururent en chemin ….
Encore aujourd’hui cette route de montagne n’est pas des plus facile et traverse des paysages particulièrement sauvage, montagneux, ingrats, mais le cadre vaut le détour !
Ce « crochet » en Alaska effectué nos rejoignons Whitehorse et la route du retour identique jusqu’à Wastonlake. A partir de là nous empruntons la »Alcan » sur toute sa longueur.
Cette voie importante n’a rien d’une autoroute, elle traverse au Yukon puis en Colombie des paysages que nous connaissons bien maintenant mais avec les glaciers en moins et la neige qui a souvent disparu : il fait plus chaud, l’été est arrivé. Nous croisons davantage de circulation, gros « trucks », et dizaines de touristes US montant vers le nord sans s’inquiéter de l’état de la route souvent en travaux à cette époque : pour plus de facilité on redresse les courbes et on arase les montées ! Sur ce trajet de retour nous roulons côté est des Rocheuses : un autre point de vue moins spectaculaire mais encore très beau : toujours des lacs et des forêts et nous croisons même un troupeau de bisons sauvages ! Plus nous descendons plus le paysage se banalise bien que la chaîne de montagnes reste en fond de paysage. L’»Alaska Highway »s’arrête officiellement à Dawson Creck après 2500 km depuis Fairbanks ! En BC la route reste pittoresque jusqu’à notre entrée en Alberta. Auparavant nous avons pu découvrir ce qui fait, hormis le tourisme, la richesse de cette région : l’exploitation du gaz de schiste. Il fait la fortune de petites villes comme Fort-Nelson ou Fort-St-John qui sont devenues des centres urbains très actifs.
A partir de l’entrée en Alberta le changement est encore plus net même si le paysage reste encore un certain temps vallonné. Nous découvrons avec surprise ce qui fait la richesse de cet état canadien où les terres sont pourtant très fertiles et très exploitées (élevage et céréales). En effet même dans les parcelles cultivées on voit fonctionner les pompes à pétrole ces étranges machines telles qu’on les voit dans les films qui puisent dans le sol le pétrole : « l’or noir » ! Nous sommes loin de l’ambiance »nature » traversée depuis notre départ ! Et pour la première fois depuis longtemps nous traversons une « vraie » grosse ville : Edmonton, la capitale de l’état, centre financier mondial et boursier du pétrole.
Mais tout a une fin ! Après 29 jours de voyage et 10 000km parcourus dans un décor de rêve nous déposons notre véhicule à Calgary où l’avion nous attend…..
Mai/juin 2016
Jean-Pierre et Paulette Moron